En général on ferme les yeux, on ne voit pas; l'impensable, on n'y pense pas.
J'ai eu l'occasion à plusieurs reprises de rencontrer des femmes battues, dans tous les milieux. Y compris la grande bourgeoisie. Pour cela les femmes sont vraiment égales.
Elle se nommait Claire, elle avait trois enfants du même âge que les miens, son ainée était très amie avec Alice. Elle venait chercher ses enfants à la sortie de école, toujours superbement habillée, Tout chez Claire nous faisait envie: ses voitures qu'elle changeait tous les ans, ses vêtements, elle arborait la moitié des collections de nos boutiques préférées; accessoires et bijoux rien n'était jamais laissé au hasard. Elle habitait un peu plus loin une magnifique maison, une des plus belles du quartier, lorsque nous étions invitées à prendre le thé, dès le portail nous savions que nous étions pas vraiment du même monde, parc avec jardinier, maison de rêve...
Mes amies en bavaient, personne ne semblait avoir remarqué que lorsque Claire enlevait ses lunettes de soleil, elle avait des yeux bien tristes. Certaines mettaient cela sur son caractère mélancolique, sur la retenue dont en toute occasion Claire faisait preuve, je n'en étais pas convaincue. Claire était solitaire. Son mari avait bien entendu une excellente profession, qui l'avait emmené bien loin de leurs familles.
Claire et moi partagions une activité commune à l'école, et nous nous retrouvions toutes les semaines dans la bibliothèque du collège. Au fil du temps s'était instauré une relative amitié. Nous parlions souvent de nos enfants, de nos deux filles surtout.
Je me souviens d'un hiver où Claire était encore plus taciturne que d'habitude, se planquant derrière lunettes et foulard, prétextant s'être enrhumée pour ne plus tenir sa permanence avec moi. Je savais et je ne pouvais pas aborder avec elle ce qui faisait de sa vie un véritable enfer. Peu de temps après terriblement gênée, elle me demanda conseil. Elle avait un chien, adorable, gentil et bien élevé, son mari ne le supportait pas. Il rentrait parfois, sans qu'elle sache pourquoi dans des colères terribles contre lui et le frappait sans aucune raison, sa violence redoublant sous les gémissements. Claire craignait pour la vie de son chien.
Elle me détailla alors des scènes terrifiantes, j'avais l'affreux sentiment qu'elle ne parlait plus du chien mais des enfants et d'elle-même. Claire me répétait inlassablement, Mais en dehors de ces colères, Guy est vraiment très gentil, il ne faut pas que quoi que ce soit le contrarie, sinon il se met en colère et ne se contrôle plus. Elle rappelait sans arrêt, mais il ne s'agit que du chien, bien entendu.
Me demandant vraiment mon avis, après lui avoir suggéré des banalités qui ne pouvaient l'aider, je lui assurais sur le ton de la légère plaisanterie qu'il fallait qu'elle éloigne soit son mari, soit son chien.
Elle m'assura ne pouvoir s'éloigner de son mari, son sourire démentait ses yeux apeurés. Elle éloigna ses enfants qui partirent en pension, très loin, ne revenant qu'aux vacances, où stages de tennis,voile, golf et équitation les maintenaient plus que de raison loin de leur maison, Claire avait emménagé un studio, au fond du jardin, afin qu'ils aient leur indépendance, c'était mieux pour tout le monde.
Je connaissais un peu Guy, homme adorable, cultivé, charmant, rien ne laissait soupçonner qu'il put être parfois si violent. Claire l'aimait et est restée avec lui. Je ne sais si son mari a pu se faire aider, je ne sais s'il a réussi à chasser les démons qui détruisaient leur vie. Claire est une femme très courageuse, altruiste mais il y reste une seule chose je n'aurais supporté cela de mon mari et même si je l'adore, je serais partie avec tous mes enfants sous les bras.
Elle est restée, comment? Pourquoi?
Aujourd'hui, 25 novembre , journée des violences conjugales, hommes, femmes et enfants sommes concernés, les violences peuvent être physiques mais aussi psychologiques.
3 commentaires:
Hier soir en regardant un reportage télé à ce sujet, j'ai découvert que toutes les femmes se disent qu'elles partiraient, et que dire cela sans jamais avoir été battue rajoute de la honte aux femmes battues qui restent.
Autrement dit, j'ai affirmé une connerie, je ne sais pas comment j'aurais réagi, on ne sait jamais comment on réagirait avant d'être confronté à ce type de problème.
Désolée si j'ai blessé quelqu'un. :(
Et on dit concernant les femmes battues que 15% sont des hommes.
Il est probable que les hommes soient autant victimes que les femmes de violences mais que celles ci prennent une autre forme moins facilement détectables, de violences psychologiques avec chantages, dénigrements.... Les hommes n'en parlent jamais non plus, et se réfugient souvent dans le boulot ou l'alcool et parfois se suicident.
Parfois le divorce est un paradis comparé à certains enfers conjugaux! :(
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