De tout temps mon rêve eut été d'être anthropologue, genre l'exploration minutieuse des groupes humains grégaires ou pas, solidaires ou non qui peuplent la France.
Lhom et moi, devenons spectateurs limite voyeurs, souvent rigolards dans bien des situations. Notre explo découverte du Jura fut une mine de pépites fabuleuses. Nous étions passés par le Beaujolais aux pierres dorées et avons fait étape pour déjeuner, au " Restaurant du donjon" à Oingt, superbe et sympa restaurant aux prix sages (sauf pour le beaujolais, bien entendu...) .
Midi vingt, nous étions parmi les premiers clients à squatter la terrasse, et heureux de l'être, déjeuner, calme et velouté dans le doux tintement des couverts et conversations à voix basses de gens "très bien élevés" très cultivés ou qui faisaient semblant de l'être. Monde irréaliste, mais sympa.
Treize heures trente, une tribu arrive, Mamie, soixantaine dynamique, jeune malgré ses rides, ses enfants et petits enfants, trois fils mariés l'un avec une jfbstr (jeune femme bien sous tout rapport (???) ) les deux autres avec des plantes décoratives, l'une anglaise, fine liane diaphane, et l'autre super bombe latine aux jamabes interminables. La seule fille de la "mère", semblait elle aussi, tout à fait jfbstr. Avec eux, leur flopée de jeunes monstres affamés de six ans pour l'ainé à quelques mois pour le cadet complétaient l'assemblée.
La joyeuse grand mère s'installa au centre de la table, présidant ainsi à l'anglaise et clama:
"Qui veut s'asseoir à côté de moi?"
Manque de bol, ses fils n'entendant pas l'appel s'assirent promptement à un bout, son gendre prétexta, le soin d'un jeune enfant se replia discrètement à l'autre bout.
Elle garda le sourire, et déclara:
"Je prends mes petits fils alors! Elliot à ma droite et Octave à ma gauche!"
6 ans et 4 ans ils protestèrent en pure perte, la famille fit bloc:
"Quelle bonne idée, maman!"
"Ce sera un souvenir pour les garçons!"
Le reste de la salle découvrit avec effroi que ces bambins affamés n'étaient point nourris. Cris pleurs, rires des enfants et injonctions des parents montèrent en volume. Ainsi que le choix de l'apéro, hyper important, couvrit le reste des chuchotements des autres pauvres naufragés de la terrasse. Treize heures cinquante:
"Alors du champagne pour tout le monde ou certains veulent du Chivas?"
Un mini plat Blédina, donné à réchauffer fut rapporté en moins de deux minutes par une serveuse effarée, mais très pro qui suggéra.
"un menu enfant pour tous les petits?"
La proposition fut acceptée au soulagement collectif.
La grand mère jugea alors qu'en attendant, elle gratifierait la chair de sa chair d'un merveilleux souvenir; et distribua alors solennellement un cadeau à chaque petit.
""Quelle merveilleuse idée, maman, un tee shirt brodé 60 ans avec des petites étoiles pour Elliot, il est ravi, tu le mets tout de suite, n'est ce pas mon chéri?"
Elliot protesta qu'il voulait garder son tee shirt propre pour plus tard, tous n'eurent pas cette chance!
Elliot profita d'un moment de communion familiale pour tenter une dérobade.
"Mamie, je veux aller m'assoir à coté d'Hugo, pour lui parler"
Sa grand mère accepta volontiers, les mères d'Hugo et Elliot refusèrent avec énergie, prétextant la pagaïe (!) que cela générerait mais surtout envisageant avec angoisse la place vide qu'Elliot laisserait à la droite de sa grand mère....
Elliot fut donc condamné à passer un interminable déjeuner coincé entre sa grand mère et un bébé fille de deux ou trois ans. Les jeunes adultes discutaient en s'interpellant d'un bout à l'autre de la table pour passer par dessus le rempart que leur mère et les enfants formaient au centre.
Nous partîmes le plus vite possible. Lhom aurait aimé rester un peu, pour voir, moi, pas.
La restauratrice lors du règlement du déjeuner, à la reception, lui glissa avec un grand sourire.
"vous partez au bon moment!"
La grande salle à l'intérieur était vide, les lianes fumaient et personne n'y pouvait rien!
Happy birthday Granny!
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