Ce midi, mon mari m'a fait une réflexion qui me parut étrange, j'en fus d'abord révoltée avant qu'il ne s'explique. Il m'a dit ceci:
Finalement tu as de la chance, tu as eu une enfance exceptionnelle, très riche, c'est un énorme avantage.
Je lui répliquais vertement qu'une enfance comme la mienne je m'en serais volontiers passée!
Peut être mais tu as vécu en Afrique du Nord, en Afrique Noire, habité tout près des gitans et aussi aux Antilles tout cela est une richesse fabuleuse, tu ne te rends pas compte! Tu devrais raconter que tu habitais enfant dans la rue de Manitas de Plata!
Jamais je n'ai vu vraiment d'avantage à mon enfance chaotique, j'aurais rêvé habiter un village toute ma vie, et ne pas être toujours la petite nouvelle, connaitre les codes en usages chez ces tribus aux quelles je devais m'adapter, alors qu'enfant je m'apprivoisais à peine, déjà nous refaisions nos cartons.
Enfant, ma plus longue pause fut dans l'ancien couvent des Ursulines à Montpellier (trop la classe, vu de loin), d'un côté les grands boulevards de l'autre la petite rue où habitait des gitans, dont, disait on la famille de Manitas de Plata. Je me souviens des gitans assis dans la ruelle, des guitares, des rires, des gosses, des odeurs aussi...
J'habitais au premier étage, à gauche sur la photo les trois ou quatre fenêtres du milieu, l'appartement était à lui tout seul tout un poème, au premier étage à gauche, à droite un couloir et des anciennes cellules transformées en débarras.
Lorsque j'ai épousé mon mari je lui enviais son éducation bourgeoise tranquille de province où l'on entend couler la rivière au printemps, et où le brame du cerf est classé évènement exceptionnel méritant une dévotion extrême. Je n'avais pas de culture croyais-je, mon enfance est constituée de lambeaux de cultures différentes, de ma petite enfance en Algérie puis au Cameroun, quelques étapes en France, mes parents ne se rendaient absolument pas compte des effets de leur nomadisme sur notre éducation.
Je me souviens avoir vécu trois mois, l'été, sous une tente, au bord de la mer, dans un camping en attendant que notre appartement ne se libère. De grandes vacances, nous étions chouchoutés par tout le monde et j'ai passé de longues heures des jours de pluie en septembre sous une table de ping pong, le camping déserté. Tout compte fait, si je revisite mon enfance, il est assez logique que je ne pense pas forcément comme "tout le monde" voire que je sois parfois complètement décalée.
Plus petite j'ai vécu aussi, environ trois mois ou quatre mois, dans un hôtel entre deux affectations de mon père, hôtel de famille, les enfants se font à tout, entre valises et les vacances que l'on attendait pour partir passer Noël dans une vraie maison, chez ma grand mère.
La réflexion de mon mari a réveillé plein de souvenirs chez moi, alors que lui, ne pensait qu'à mon étrange attitude face au monde, au racisme, aux cultures, mélange chez moi de grandes compréhensions parfois entremêlée aussi à de grandes exigences.
L'immense avantage d'une enfance bousculée est que l'on ne regrette jamais qu'elle soit terminée, je suis heureuse depuis que je suis adulte, car si le monde me fait parfois peur, je sais comment me mettre à l'abri de ses errances et si je déteste toujours autant le brame du cerf et que pas un massacre me rappelant d'autres trophées immondes ne rentrera dans ma maison, j'ai la maison dont je rêvais, dans un pays à l'abri et je me battrai si je le dois, pour sauvegarder cet havre de paix.
La délinquance arrive dans nos montagnes, de dangereux plaisantins ont mis ces panneaux, cet hiver, la gendarmerie les recherche activement.
2 commentaires:
Voyager est paraît-il une richesse mais avoir des racines dans lesquelles on peut se retrouver est un immense réconfort.
il y a toujours un moment où l'on désire retrouver ses racines, pour moi cela aurait été difficile de ne pas m'y raccrocher, mes racines sont mes bouées de sauvetage.
A bientôt.
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