lundi 7 novembre 2016

Carpe diem.

Il y a des moments dans ma vie où je me sens, belle intelligente, drôle et presque cultivée, si, si, et il  y a tous ces autres moments, où je sais que je suis un imposteur, je ne suis ni belle, d'ailleurs ça c'est vrai, ni vraiment intelligente, sinon je me débrouillerai mieux, encore moins drôle, souvent je pleure et chouine sinon je chouine et pleure, et pas vraiment cultivée, juste un vernis un peu disparate, bref, je suis presque toujours,  simplement nulle.

En ce moment je suis dans une période - - - - -, pas de chance, ni pour moi, et encore moins pour mon entourage. Et pourquoi? D'abord car j'ai un égo fragile, car je suis fragile, car je ne suis ni belle, ni intelligente &co, je suis moi, en vrai toute cabossée par la vie.

Il y a  une bonne dizaine d'années, voire une vingtaine, je voyais un psy, très bien, juif, cela me convenait, car à l'époque je devais vraiment déblaterer ma haine contre cette éducation idiote dont je me sentais victime, éducation catho coincée du XIX ème, ma mère avait trouvé génial l'éducation qu'elle avait reçu et elle espérait qu'à mon tour, j'en profiterai pleinement, éducation où l'on apprend aux filles à obéir, à ne pas réfléchir, à accepter tout ce qu'on nous raconte comme vérité première, et aussi accessoirement à coudre et à tricoter. Je n'ai jamais su coudre, ni tricoter, ni compris comment gérer tout le reste, et mon émotivité a pris le pas, me menant le plus souvent dans des contrées de souffrances.

Ce psy m'a suivi une année scolaire et lorsque j'ai compris qu'il ne pouvait pas grand chose pour moi,  je ne suis plus allée le voir, j'en été désolée, car j'espérais, il était navré, il ne pouvait me réparer. Je ne guérirai jamais du suicide de mon frère aîné, ni de celui de mon frère cadet, je ne guérirai jamais de toutes ces blessures et il me faut depuis toujours  tourner la tête lorsque mon passé me rattrape, à tout instant, sans prévenir, des souvenirs.

Ma belle soeur est morte et enterrée,depuis quinze jours,  et je dois faire face à nouveau à  la grande marée soulevant toutes les boues qui me plongent en enfer. Et il me faut aussi faire avec que je n'ai pas pu aller à son enterrement, car j'ai fuis cette marée, ne voulant pas me laisser enliser. Je fuis très souvent quand j'ai peur, je ne suis pas à la hauteur.

J'aimerais reconstruire ma cabane dans ma tête, celle qui laisse loin cette vase qu'elle ne sait gérer, depuis si longtemps la peste la gagne dès qu'elle s'y confronte, et je ne sais faire face qu'à la circonscrire, l'entourer de barbelés, l'enterrer, l'oublier.

Ma vie aurait été très différente si mes parents m'avaient fait aider lors de la mort de mon frère aîné, d'ailleurs s'ils avaient fait aider mon frère cadet, il ne se serait probablement pas suicidé dix ans après, mais on ne peut reconstruire sa vie, ni la vie de personne, on doit faire avec ce qu'on a tout simplement.

Ce billet est très personnel, et peut-être fort difficile à lire, j'en suis désolée, mais je vais mieux puisque je peux mettre des mots sur ce que je vis, et je me dis que sans mes cabosses j'aurais peut-être vécu une vie Ripolin, heureuse, mais sans pouvoir profiter du bonheur véritable, ces moments où on souffre moins, parfois presque pas, voire pas du tout. Ces moments où on profite de bonheurs simples, de bons moments partagés avec son mari, de réunions de famille avec ses enfants et de voir un tout petit faire ces premiers pas, ces bonheurs touts simples.

Ma belle soeur est morte et je n'ai pas su faire face, je n'ai pas su faire le pas qui aurait soutenu son mari, simplement, comme les autres, je suis restée terrorisée comme un lapin aux yeux rouges dans la lignée du fusil qui va tous les dégommer. A qui le tour?

A la vie! Comme dans cette scène d'un film qui hurle si souvent à mes oreilles. Le cercle des poètes disparus.



                                                          Carpe diem

6 commentaires:

Anonyme a dit…

Les malheurs de la vie peuvent détruire, vous, ils ne vous ont pas empêchée d'être une belle personne.
Vous savez donner du bonheur, pas seulement à vos proches mais aussi à vos lecteurs. Vos textes, légers ou plus profonds sont toujours touchants. On doit tous vivre avec nos cicatrices, vous le faîtes élégamment. Prenez soin de vous, de vos proches et de votre blog que j'aime beaucoup fréquenter. CCLM.

Crisfi a dit…

La vie n'est pas un long fleuve tranquille et vous n'avez pas été épargnée. Vos différentes interventions sur ce blog ne laissaient pas soupçonner ces douleurs qui sont en vous. C'est bon de pouvoir s'épancher, de partager avec des lecteurs amis. Comme votre titre le dit, "carpe diem" : la belle famille que vous avez créée avec votre époux, les épisodes heureux avec votre famille que vous nous faîtes partager
au fil du blog, tout cela fait partie de votre réparation, "ils" appellent ça, la résilience...
Continuez, j'aime votre blog, j'aime votre famille pleine de vie et vous même qui êtes si active, si présente auprès des vôtres.
Amicalement, à bientôt !

Le chêne vert a dit…

Je t'ai lue avec beaucoup d'attention et me suis parfois retrouvée dans tes écrits. On est tous un peu cabossés, certains plus que d'autres c'est vrai et les deuils nous font toucher du doigt l'immensité de la disparition. Chaque deuil nouveau est pour toi une souffrance immense car elle te fait te rappeler tes chers disparus et de sales moments.
regarder en arrière n'est pas obligatoirement incompatible avec la course vers l'avant. Pour se construire on a besoin de notre passé, qu'il soit bon ou mauvais.
je pense qu'une psychothérapie n'est pas suffisante pour toi, une analyse serait mieux appropriée mais elle demande des années de pratique et ne résout pas tous nos problèmes. Elle nous fait seulement avoir un autre regard sur soi et les autres. N'aie pas honte de n'avoir pas pu aller à l'inhumation de ta belle-sœur, le papier à lettres fait aussi parler de notre panoplie.
Tu vas repartir vers l'avant car tu n'es pas quelqu'un qui se laisse aller bien longtemps. On est tous dans le même bateau...
Bisous.

Anonyme a dit…

Pardon j'ai dit parler au lieu de partie (pour le papier à lettres)

Ladywaterloo a dit…

Merci, je me "panse" et petit à petit ça va mieux, je connais ces douleurs et même si elles font très mal, j'ai l'habitude, enfin je le crois, mais cela surprend toujours quand même, le réveil de vieux démons, les angoisses, les pourquoi..
Les trucs qui ne servent à rien pour vivre et qui me paralysent et détruisent aussi mon entourage, ma famille, mes amis.
Mon psy m'avait proposé une analyse, je l'avais refusée, trop long, trop incertain, il m'avait dit craindre pour mon mariage dans cette analyse (j'ai une belle famille destructrice, et lorsqu'on est "sain" on coupe les ponts avec tous ceux qui sont des souffrances, en eux mêmes)
J'aimais mon mari, je n'avais pas envie de tout perdre, j'aime toujours mon mari et chance, il m'aime aussi, j'ai refusé de faire une analyse, tout perdre et avoir tout compris ne me parait pas une fin heureuse.

Anonyme a dit…


<3