Ethique et génocide (de limaces..)

Le gros problème du jardinier souhaitant un jour récolter des haricots verts, est de voir anéantir la couvée alors que l'œuf n'est point éclot. Je plante donc des haricots, arrose et bine, regarde matin et soir la planche objet de tous mes soins. Dès qu'une petite tige sort de terre, portant en elle la promesse de récolte, une limace vient se régaler de cette délicieuse pousse, toute tendre et fraiche. 

On pourrait bien sur se passer de haricot vert me dites vous, certes mais ces gastéropodes se régalent également de fraisiers, d’hostas et de milles choses qui feraient votre bonheur si leur voracité n’anéantissait pas tous vos espoirs, en un seul instant. Ainsi l’an dernier je plantais des potirons, en pot, lorsque les pousses de ces potirons me semblaient assez fortes, je les mis en pleine terre, terre grasse et humide ainsi qu’ils préfèrent, trois jours plus tard, je retrouvais, des bouts de tiges creusées, grignotées à l’intérieur, même en dessous du niveau du sol…..


Il y a les tue-limaces, traditionnels, qui tuent aussi les hérissons et les crapauds grands mangeurs de limaces ; nous n’avons pas la chance d’avoir des hérissons mais il est certain que si je les empoisonne avant même leur venue, je n’ai aucune chance d’en voir un jour. Il y a aussi les anti limaces, écolo, ceux là tuent les limaces car coupe faim, les limaces meurent affamées, mais non empoisonnées. Je n’ai pas le cœur d’assister au lent dépérissement de cette espèce ; de plus qui dit écolo dit niche commerciale, en l’occurrence ces granulés coutent très cher, et il me faudrait un camion entier afin de réduire la population locale de façon écologique




Les dernières méthodes tiennent du folklore, coupe de bière, qu’aime aussi les chats, cendre et chaux qu’elles haïssent lorsque le temps est sec or, les limaces sortent le matin et le soir, lorsque le temps est humide, trempé, enfin détrempé, chez moi tout le temps! les coquilles d’œufs broyées font mal aux papattes de ces bestioles , aussi soigneusement je garde mes coquilles d’œufs, les broie et entoure certains de mes bébés plants chéris. Barrières peut être efficaces aussi j’en use, mais sans grand espoir de voir ainsi le pouvoir destructeur de cette population honnie du jardin diminuer de manière sensible

De plus à quoi servent les limaces ? Elles nettoient un peu le jardin, mais les fourmis et autres cloportes le font tout aussi bien en épargnant, eux l’intégrité de mes plantes compagnes. Ces parasites nuisent à ma sérénité, ils sont laids, bêtes et méchants. Ils se multiplient à grande vitesse, et chaque jour les retrouve plus nombreux, en terrain conquis dans ma cour, mon verger, mon jardin, partout.

L’an dernier j’ai essayé de les éliminer, aussi tuai je matin et soir des limaces, que des adultes, qui faisaient énormément de dégâts. Au début je les enterrais, mais rapidement j’ai vu qu’elles savaient creuser des galeries et remonter. 

Puis,  j’ai essayé de les noyer, les poissons sont trop peu nombreux pour les manger, et le petit ru qui traverse le verger pas un moyen suffisant. Chaque jour, j’éliminais une centaine de limaces puis une centaine deux fois par jour. J’en suis arrivée à les couper en deux, au sécateur, sans les regarder, méthode, rapide, efficace et écologique, je laissais sur place leurs dépouilles afin qu’elles régalent leurs prédateurs, qui daigneraient passer par là, voyant ainsi le couvert mis, j’aimerais qu’ils trouvent refuge sous un tas de branches, je les hébergerai. 

L’efficacité de mon système d'élimination et la rapidité de mon entreprise a rapidement effacé toute conscience de supprimer un être vivant, j’en suis à éliminer, même les plus petits limaçons, qui ne deviendront grands ainsi. Mon but est de les éradiquer, définitivement, mais tous les jours, des cohortes de limaces franchissent la frontière de barbelés, remontant de la prairie. Il me suffirait presque à présent de patrouiller le long de cette limite afin de contenir le problème.

                                    photo du blog arbres et vie!





Parfois, j’essaie d’imaginer des méthodes plus radicales, des solutions finales. Si elles existaient je crois que je les utiliserai. Je ne regarde plus ces bêtes, je ne vois plus que leur pouvoir de nuisance. Mon esprit s’est mécanisé et je m’émerveille encore sur un papillon, pourtant qu’a-t-il de plus ? Rien, juste il ne cause aucun dérangement dans mon monde que je souhaite parfait. Au fur et à mesure de mes promenades solitaires, dans la brume du matin, ma philosophie de la vie, du pouvoir sur la vie, a avancé j’ai enfin compris comment on pouvait devenir en toute bonne conscience tortionnaire. Trop d’empathie de ma part ajouté à trop d’anthropomorphisme.

Ouf, souriez, nous parlions juste de quelques gastéropodes