jeudi 9 août 2012

Maison qui vous dévore, vous enterre...

Depuis un mois, je vous mens, je ne me mens pas, je sais que cela m'angoisse, me stresse au delà de l'imaginable, simplement je n'avais pas envie d'en parler.

Et là, je crois que je peux en parler. Grosse victoire sur moi, cela veut dire que j'accepte le problème. Le séjour de maman le mois dernier ne s'est pas très bien passé, normal, on ne s'entend pas, on ne s'est jamais entendu et elle attend de moi des trucs que je ne pourrais jamais.

Au centre du  problème, une famille, celle de ma naissance où la mère fut assez incapable, par incapacité (ça j'aime^^^) et où sur ses cinq enfants, deux fils se suicidèrent adolescents. Des survivants, on fait ce qu'on peut, mais nous avons bien sûr tous souffert, d'autant plus que notre mère au lieu de s'occuper des enfants survivants  s'occupait d'elle même, centrée sur sa douleur. Elle n'y pouvait peut être rien,  le mal est fait.

A la périphérie du problème, je ne vais plus chez maman, et mon frère non plus, la maison étant une immense  zone d'occupation étrange. Nous aurons peut être besoin de piolets et lampes frontales pour s'y retrouver, je plaisante à peine. De ces désordres monstrueux reflétant la vie de ma mère j'ai décidé d'y mettre terme à tout prix avant sa mort.


J'ai rangé cette  maison avec mon homme après la mort de mon frère aîné, ai jeté ses vêtements à l'âge ou j'aurais dû aller danser sur des pistes de boite de nuit, j'ai aussi rangé les affaires de mon père et de mon second frère autant que j'ai pu, c'est à dire autant ce que ma mère m'a laissé faire, mais je ne veux pas ranger la maison de maman après sa mort.


Au baptême de Gaétan maman m'a dit sa volonté de fêter ses 80ans, chez elle, voire les 50ans de sa maison. Je fus d'abord effrayée, puis ai estimé que là, résidait peut être pour moi, l'occasion de ranger avec elle sa vie, mon frère cadet me suit dans cette résolution. Ce fut elle la première qui me parla de benne à ordures, les choses, sont, naturellement plus compliquées, actuellement.


J'ai découvert un blog génial pour l’organisation, celui de Laurence, j'y vais me réassurer depuis les quelques jours où je suis tomber sur ces pages en tapant "vider maison parents" ou un truc similaire. Le grand mas de maman est un naufrage. Je souffrais en y allant, je n'y vais plus, mon frère fait de même, ma soeur peut, encore, je crois y aller de temps en temps.

Maman m'a traité ce matin plusieurs fois de "méchante", alors que je lui demandais simplement de nous simplifier la vie en commençant à trier des papiers, lorsque je lui dis que mon cadet ne pouvait plus, lui non plus nous fûmes simplement traités de  "délicats", elle m'a bien sur dit, comme depuis si longtemps sa volonté de mourir à m'écouter, mais lorsque je lui ai demandé depuis quand elle me disait cela, elle l'a daté de la mort de mon père, je l'ai rassuré, cela datait de ma petite enfance et très régulièrement de la mort de mon frère aîné, dix ans avant celle de mon père.

Bien sur, je suis mal de penser ainsi, mais aussi, je me trouve forte d'arriver à en parler.

Depuis presque toujours je range ma maison afin qu'elle ne fasse pas mal à ceux qui devraient la ranger après moi si je n'y reviens plus.



Maman a été une très mauvaise mère, elle n'était pas faite pour être mère, cela je l'accepte, mais là où le bât blesse c'est qu'elle donne à tous et à nous, surtout,  encore et toujours des leçons sur l'éducation des enfants. J'ai envie à chaque fois de céder à la folie et de hurler, je ne le fais pas, au pire je ne suis pas cool, vraiment pas cool. Le mois dernier  maman béatement nous a affirmé combien c'était bien d'avoir des garçons, car j'affirmais ma préférence pour les filles,  les garçons,nous a t-elle dit,  c'est mieux pour les papas et ça fait plaisir aux mamans, elle a eu deux fils morts, par suicide sur ses trois fils, cela j'ai réussi à le taire.

Je le paie, naturellement mais ai je le droit de faire encore plus souffrir ma mère, naturellement pas. Et ce midi après l'horrible coup de téléphone, où je finis par dire à maman que nous rangerons ou pas sa maison comme elle le souhaite, mais que si elle le refuse il n'y aura pas d'anniversaire chez elle et que je m'en moquais, nous pouvons le faire ailleurs,  et que ce sera son choix, j'étais heureuse ensuite  de retrouver, mon mari, mes enfants, tous si  impuissants devant ce problème, mon mari très sévère envers ma mère, mais tous souhaitant surtout m'assurer de leur amour.

En cela même si je meurs, là, j'ai réussi ma vie ( ma cuisine est rangée^^^^)

J'ai un mal fou à comprendre ma mère et ne peux accepter son égoïsme,  elle possède plein de choses dont elle ne se sert jamais et qu'elle ne veut donner à personne, une montagne de serviettes et draps, alors qu'elle vit seule, par exemple, et elle en rachète encore tant et plus sans jamais vouloir céder les plus vieux à ceux qui en auraient besoin, je ne comprends pas.

J'ai un mal fou à comprendre ma mère et ne peux accepter son égoïsme, elle tenait à  ses bijoux comme Harpagon à sa cassette, je lui avais dit d'en donner, à ma belle soeur, par exemple, elle ne l'a pas fait, elle a été cambriolée, je fus heureuse d'avoir réussi à ce qu'elle laisse la petite bague "presque fiançailles "de ma seule et unique belle soeur alors  qu'elle comptait la  lui réclamer, je ne comprends pas, mais suis heureuse,  cette petite bague est toujours dans la famille.

J'ai un mal fou à comprendre ma mère et ne peux accepter son égoïsme, elle ne m'a pas même dit ce qu'il  me fallait pour la naissance de Charlotte alors que je n 'avais pas 20ans, ne m'a rien offert, pas même tricoté une seule brassière, n'est pas venue pour la naissance, je ne comprends pas.

J'ai un mal fou à comprendre ma mère et ne peux accepter son égoïsme, elle a laissé aussi, abandonné ma soeur aînée pour la naissance de son aîné, je revois mon père lui demandant d'y aller, se proposant d'aller acheter des billets d'avion , ma mère refusant et s'achetant de l'argenterie, bien plus importante à ses yeux, je ne comprends pas.


Je n'arrive cependant pas à me détacher complètement d'elle, le taux de culpabilité qui m'a été asséné sur la tête est trop gros, je suis trop fragile. J'aimerais ranger sa maison et si elle me dit encore qu'elle souhaite mourir en m'écoutant lui dire que moi aussi, parfois, je préférerais.

Et sinon? Je vais bien, la résilience peut être?



8 commentaires:

mariannette a dit…

Je n'ose rien dire, car je suis si proche de ce billet,
je ne voudrais pas choquer personne
Résilience, certainement pour moi, car j'ai résolu le problème radicalement.
moi aussi, un frère suicidé, sur un !
l'autre mort bébé, maintenant j'ai même des soupçons
Je te trouve courageuse, et surtout tu as su créer avec ton époux une belle famille
avec bonheur...
courage !

Anonyme a dit…

je suis très émue ... moi qui croyais être à plaindre : je vous trouve très courageuse et je ne sais pas comment vous ne vous êtes pas effondrée comme moi : et je me dis que ce n'était pas grand chose par rapport à ce que vous avez vécu !
je vous souhaite tout le bonheur du monde parmi les vôtres qui vous aiment...
Estelle

Francine a dit…

Je connais ce genre de mère, c'est difficile à supporter. Pour la mienne, les refus de coopérer et les demandes infernales n'étaient que des façons de se mettre au centre du monde et de manipuler la famille. Une psy m'a aidée à y voir plus clair mais tout cela est très difficile.
Je me permets quand même de te conseiller de terminer la conversation quand tu sens que ça dérape. Continuer à parler ne peut que te faire du mal et envenimera la situation. C'est important de te protéger et de lui monter des limites.
Bon courage

Jacques a dit…

Bonjour chère lady,
Un bien dur problème que celui des rapports parents enfants, surtout quand ces derniers deviennent âgés. Une rupture dans l'ordre des choses : ils se comportent comme des enfants mal élevés alors que ce sont eux qui nous ont formés. On est mal. On doute. On craint même parfois pour soi même. Les problèmes de biens viennent encore compliquer les choses : la hiérarchie des valeurs réelles devient floue et il y a parfois un jeu malsain entre le prix affectif et le prix réel. Parfois même des tiers viennent, généralement pour des raisons intéressées, ajouter au désordre. Il n'en reste pas moins vrai que nos parents sont nos parents et que ce sont les prochains a qui on est sûr de devoir, au moins la vie. Nombreux sont ceux qui vivent de telles situations. Parfois la mort intervient sans que rien n'ait évolué. Parfois, ce fut mon cas, une dure et lente agonie, a permis un pardon mutuel et à chacun de retrouver la paix. C'est tout le bien que je vous souhaite. Non pas qu'elle souffre une longue agonie bien sûr, mais qu'un déclic se produise et qu'au moins la paix revienne dans les cœurs.
Votre grande et belle famille est un soutien. Elle prouve aussi qu'on peut réussir dans ce domaine. Il appartient à chacun de nous de quitter père et mère pour fonder sa propre famille : ça ne va pas toujours sans casse.
Bon courage donc. Ménagez vos forces dans cette bataille. Une recette est peut être de se cantonner dans ses propres actes, sans plus rien espérer de l'autre. C'est parfois dur mais ce peut être nécessaire.
Et surtout continuez d'écrire ces pages familiales si riches.

iris a dit…

votre billet est trés touchant. Il reflète bien les rapports compliqués que l'on peut avoir entre mère /fille ou mère/fils aussi. Il est question de rangement. A vous lire je note une zone de flou, d'espace peu délimités, de zones d'intrusion de vous et votre mère sous le pretexte de rangement. Cette zone floue peut devenir l'espace de chantage, de malaise. Surtout que ranger une maison, c'est aussi un peu ranger une vie.

Pour ma part, c'est un autre problème, ma mère se met à distance. Pas question d'aller ranger chez elle, de toucher à un seul objet mème. Par son intransigeance, elle a fait fuir tous le monde de sa belle et grande maison à la campagne. L'endroit qui aurait pu etre le lieu de reunion familiales à l'image de votre maison d'ailleurs est un lieu désert.
Aprés, elle se plaint qu'elle est seule! c'est à se taper la tete contre les murs.
Mon frère unique m'a fait comprendre à demi mot avec cynisme qu'il attend sa mort pour s'approprier les lieux. Il n'est pas méchand mais il est bléssé par l'attitude sauvage de ma mère. Moi, je ne réclame rien, je me dis seulement que c'est dommage.On aurait pu passer de bons moments ensemble. Je ne sais pas pourquoi une mère a si peur du contact de ses enfants . C'est un mystère pour moi, incompréhensible.

Ladywaterloo a dit…

Merci à tous pour vos mots, si gentils. Ma famille est un vrai soutien et je suis, en fait c'est terrible mais vrai habituée à "tout ça".

Le rangement de la maison de maman est absolument nécessaire si elle veut nous recevoir pour ses 80ans et/ou les 50 ans de la maison (enfin de son achat de ce vieux mas). Ma belle soeur a comparé cette maison a un camp de Roms, le désordre est presque maladif chez maman (la maison est néanmoins propre, comme quoi)

Je préférerais trier et ranger avec l'aide de mon frère et de nos conjoints de son vivant, ce sera moins glauque, et lui permettra peut être aussi à elle de vivre paisiblement dans une maison qui en soit plus un chaos absolu.

Elle est, toujours à priori d'accord avec l'idée puisque elle en a parlé elle même à mon frère. La réalisation ne sera pas toujours simple, mais sachant qu'elle a un genou en compote (elle se fera opérer l'hiver prochain) elle ne galope pas dans les escaliers, il me suffira de changer d'étage lorsque les échanges seront difficiles.

J'ai déjà rangé entièrement sa maison et bien que trente ans après elle me reproche encore d'avoir jeté une vieille marmite (elle en a peut être 25^^^^) dans l'ensemble ça s'est bien passé car elle sait qu'elle en est incapable et n'aime pas subir son propre désordre.

Martine a dit…

Ta mère se retrouve seule mais je crois que c'est le lot de beaucoup de vieilles mères. En vieillissant, elles se recroquevillent sur elles-mêmes et ne supportent plus le moindre changement. En plus elles se plaignent. Je ne crois pas qu'il faille d'ailleurs se mêler de ranger leur maison, proposer oui mais s'imposer non et d'ailleurs, je ne crois pas que tu t'imposes. deux de tes frères se sont suicidés et il y a sûrement une tonne de non-dits et de rancunes. Rien n'est élucidé. Peut-être, en effet, avant de mourir,voous aurez la surprise qu'elle veuille mettre de l'ordre dans tous ces sujets trop sensibles pour elle comme pour tes frère et soeur. Peut-être lui dire que si un jour elle désire vous parler, vous êtes prêts à l'écouter
Pour la réunion de ses 80 ans, je te suggère le restaurant! et si elle veut absolument vous recevoir, que ça ne dépasse pas l'apéritif chez elle et le repas au resto.
C'est une situation difficile mais je crois assez classique. la mort d'un enfant (et encore plus de deux)est trop dur à vivre, il en reste obligatoirement des séquelles. Heureusement tu as su te construire avec ta famille à toi... Et tu ranges ta maison!
Nous sommes à l'âge aussi où on voit la vieillesse de nos parents et après... C'est nous!

Anonyme a dit…

bah, j'ai peut etre un debut d'explication : c'est une radine. comme ts les radins, elle accumule, empile, quite à se noyer sous les objets et ne se separe de rien.
et comme la radinerie va de pair avec la radinerie affective.....