samedi 14 septembre 2013

Adieu le Jean.

Notre vieux voisin est mort, il avait 80 ans, vieux garçon, ancien maçon. Il est mort de la maladie du siècle, le cancer. Par chance, tous étaient d'accord, son cancer l'emporterait autant qu'il puisse avoir une bonne qualité de vie, dut il vivre quelques semaines de moins. Il est parti à l’hôpital mercredi et s'est endormi à jamais moins de 48 heures plus tard.

Le hameau se vide peu à peu, je ne sais pas si on verra de nouveaux habitant le repeupler ou pas, certes nous sommes si près de la petite sous préfecture, mais l'air de temps n'encourage ni les gens à acheter, ni les banques à prêter, à de simples particuliers, sans dossier en béton.

Mardi nous irons à la messe d'obsèques du Jean, il y sera aux premières loges, d'habitude il attendait sur le parvis avec ses vieux potes, Dieu ne lui en tiendra pas rigueur car son coeur était aussi gros que sa timidité dans des murs trop impressionnants, il préférait la chaleur du café avec ses amis, les repas en familles, sept frères et soeurs une tripotée de neveux et petits neveux, il avait toujours un petit cadeau pour l'un ou l'autre quelques fleurs qui se fanaient à peine qu'il coupait à regret au jardin, des oeufs ou des haricots cocos, un joli bouquet de persil, du laurier et du thym, qu'il mettait par dessus le tout du panier.

En achetant notre maison, j'imaginait avec presque convoitise ce qu'il deviendrait après la mort de ces dinosaures qui le hantaient, le vieux  Granet avec  sa moustache grisonnante et son bâton qui me faisait peur, la si gentille Odette, son  épouse attachée à son ombre qui s'est laissée mourir de chagrin après le départ de son homme, la Raymonde qui faisait toujours pipi devant ma maison, en relevant ses jupes, se cachant de tous, sauf de nous quelle obscure provocation, vengeance?  Vieille sorcière  que j'évitais comme une folle la prenant pour une dingue, et enfin le Jean.

Aujourd'hui je sais que l''histoire de mon hameau tourne une page, nous ne sommes qu'une poignée, les Waterloo, un immense bataillon en saison mais pas grand monde l'hiver, et mes jeunes voisins avec leurs deux gamines.




J'ai découvert en Normandie, un cimetière où j'aurais aimé reposer. Je hais les pierres tombales en vernis noir ou gris, et découpes hallucinogènes, surmontées de pancartes édifiantes: "A notre maman adorée, ses enfants" , " Au seul contribuable jamais tricheur, son percepteur" " A mon maître adoré qui me donnait tant de bonheur avec les croquettes Friskies, Médor."

Je crains ces monuments terribles, je préférerais pour reposer, simplement une croix et quelques fleurs; mon mari aussi.


 Il est des cimetières comme est notre époque, autrefois cimetières  beaux et verdoyants, souvent, aujourd'hui cimetières de marbres froids, plus le marbre est grand  plus vous êtes invulnérable, pas ou peu de verdure sinon contenus dans des bacs, verdures de plastiques bien souvent.





  
Il est des tombes qui consolent, on pleure et on est apaisé, d'autres ou le désespoir domine, froideur  et rigueur de mises, est on obligé de se soumettre à ces lois d'aujourd'hui?



 Certaines tombes sont "relevées" , mots pudiques pour dire qu'on prend les os, et ouste à l'ossuaire afin de laisser place à des plaques de marbres, pourrait on imaginer une colocation de tombes? je cherche coloc  de tombe sympa, dans un lieu calme, vieux arbres appréciés, colocataires pas exigeants, fumeurs tolérés mais bonne humeur exigée, esprit valeur estimée..




De  cette visite je me suis dit qu'il vaut mieux se souvenir des gens qu'on a aimé dans des lieux que l'on aime que dans une "ZAD" zone à dégager.. J'espère que ce cimetière, présenté ici, avec ses habitants certains étant morts fort vieux d'autres bébés, avec son lot de saints et de salauds, restera longtemps, en jardin  de ceux qui sont partis.



4 commentaires:

fredi maque a dit…

Le Jean, ou Pierre, ou Michel, à chaque fois c'est un peu de France qui s'en va.
Prions pour qu'ils ne soient pas remplacés par des Kevin ou pire encore.
Que les bobos qui les remplacent assument un peu.

Nicolas Jégou a dit…

C'est rigolo (je me comprends) Je parlais, cette après-midi, de ce qu'il fallait faire des vieux cimetière...

Martine a dit…

Ben alors, il y a de l'ambiance sur ton blog Lady, espérons que ces gens là se réconcilieront dans la mort. De toutes les façons, ils n'auront pas le choix!

Clo a dit…

le Cimetière de Giverny, autour de la vielle église, vous plairait bien, entre les noms desuets et les patronymes illustres, les pierres oubliées et les fleurs de porcelaines anciennes, on dirait un peu un salon de thé.
Notre chère Tante Germaine, partie à 100 ans, avait choisit de se faire incinérer, c'est un beau cadeau qu'elle nous a fait : nous avons confié ses cendres à la mer, dans un endroit qu'elle aimait et auquel nous sommes très attachés, c'est facile et fréquent de l'associer à nos vies :-)