samedi 3 septembre 2011

Dire l'indicible.

Parfois on vit l'indicible et on ne peut le dire, les années passent et on est toujours là, ligoté, afin de ne faire peur à personne.

Hier, avec mon mari, nous avions choisi de regarder "Boulevard du palais" . J'aime bien cette série, je souhaitais la regarder, mais le début  du film montrait un homme qui se jetait d'un pont sous un train et mourait, mutilé, amputé de ses deux jambes.


Mon frère, Patrick, s'est jeté sous un train, mes rares proches, qui savaient  l'état de mon frère, mort, me demandèrent de ne jamais demander de détails. je n'en ai jamais demandé. Il y a de cela, environ trente ans, mais le temps, qu'est ce, face à la douleur?






Hier je suis sortie de la salle télé, malade, mon mari ne comprit pas, pour lui ce temps était si lointain, pour moi, les cicatrices font si mal encore.

Je suis allée voir un psy, longtemps, et nous convînmes, navrés l'un de l'autre qu'il ne pouvait ressusciter mes frères et que je devais vivre avec leurs morts, violentes, par suicides, et construire, bâtir et aller de l'avant.

Le premier truc, aller de l'avant, je savais, sinon, moi aussi je me serais suicidée, le second, mon instinct l'avait accompli  boucher les trous que laissaient les morts par des naissances. mais, cela ne remplace rien, ne console en rien.

Dans ma faille de famille on s'est finalement séparés les uns des autres,  les séries américaines dont je me repais si souvent sont infiniment moins terribles que ce que fut le destin de ma famille. Chacun porte des histoires difficiles mais la violence qui m'habite est alimentée par un feu de l'enfer, seule la rencontre avec mon mari parut mettre un point final à ma malédiction d'Antigone.

D'Antigone, je passai à Hamlet,, je comprends avec la désespérance d'Hamlet, et aussi celle de  la douce d'Ophélia, mais préfère à jamais le sort d'Ophélia. Se sentir, pire se savoir coupable est un enfer, même avec tout l'amour des survivants.


What If (Seulement Si)


Ici, je reste debout seule


Avec ce gros point dans mon coeur
Et il ne partira pas
Dans ma tête, je retourne dans le passé
Au début du commencement
Me demandant ce qui t'a fait changer
Bon, j'ai essayé,
Mais j'ai dû tracer la ligne
Et reste cette question qui continue de tourner dans ma tête


[Chorus]
[Refrain]


Si seulement je ne t'avais jamais laissé partir,
Serais-tu l'homme que j'ai connu ?
Si j'étais restée,
Si tu avais essayé,
Si nous pouvions seulement retourner dans le passé
Mais je pense que nous ne le saurons jamais
Tant de routes à prendre,
Quelques unes de joie
D'autres de chagrins d'amour,
Tout le monde peut perdre son chemin,
Et si je t'avais dit que nous pouvions retourner dans le passé,
Au début du commencement,
Saisirais-tu cette chance et que changerais-tu du passé ?
Penses-tu à comment parfois c'était ?
Pries-tu pour que je ne m'éloigne jamais de tes cotés ?


[Chorus]
[Refrain]


Si seulement nous pouvions tourner les aiguilles du temps
Si je pouvais changer le passé serais-tu encore mien ?
Car j'ai essayé,
Mais j'ai dû tracer les lignes
Et reste cette question qui continue de tourner dans ma tête,
Si seulement je ne t'avais jamais laissé partir,
Serais-tu l'homme que j'ai connu ?
Que ce  serait-il passé si je n'étais jamais partie ?
Car je continue de t'aimer encore plus que je ne peux le dire
Si j'étais restée,
Si tu avais essayé,
Si nous pouvions retourner dans le passé
Mais je pense que nous ne le saurons jamais
Nous ne le saurons jamais.








8 commentaires:

SylvieT a dit…

Comment dire...si seulement...Moi aussi j'aimerai pouvoir vous dire... peut être n'y a-t-il rien a dire, juste écouter...(Des fois les mots sont un peu niais je trouve).A bientôt,

helen. a dit…

Pensées.
Vous semblez très forte.
Continuez.

Clo a dit…

ouch... effectivement...
au moins vous dire qu'on est là de l'autre coté, à lire
des pensées...

Anne** a dit…

En te lisant, Lady, je réalise que je n'ai jamais parlé à mes enfants (adultes depuis longtemps), du suicide de mon frère. Je ne sais pas ce qu'ils en savent.
C'est vrai, les psychanalystes ne réssuscitent pas les frères morts. Ce sont sans doute de mauvais psychanalystes.
Mais tu vois, de cet immense désordre familial qui a suivi, de cette fragilité que j'ai gardée, et que je crains d'avoir transmise, je veux croire que mon regard sur les autres est différent, plus humain et sensible.

chris a dit…

Tendresse..

Ladywaterloo a dit…

Ce matin, j'avais décidé de supprimer ce billet, je ne voulais pas que mes enfants ou mon mari le lisent.

Ce matin, très tôt, il y avait déjà des commentaires et si j'aurais pu effacer certains coms, comment effacer celui d'Anne**!

Vous dire que je vais bien que ces bouffées de chagrin m'accompagnent bien sur, mais que je sais vivre avec et je sais même chasser le plus souvent le spleen par un humour terrible et une dureté carapace derrière laquelle je vis très bien.

@Anne, je pense que nous sommes nombreux à avoir cette "fragilité" mais le fait d'en parler à ses enfants est, je crois, essentiel.

Je suis persuadée que mon frère Patrick est aussi mort du silence entourant le suicide de mon frère aîné. On a pas pu mettre des mots sur nos blessures et ces mots ne sont pas uniquement destinés à panser, les mots protègent je crois aussi.

Mes enfants savent, je ne sais pas ce qu'ils en pensent, mais ils savent que cela fait partie de moi et cela explique aussi mes fragilités. L'enseignement le plus important est de savoir que malgré ces fragilités on peut vivre, et être heureux.

L’exhibitionnisme de ce billet est tel, que je souhaitais l'ôter. En général je ne parle pas de ces choses là, en public.

Babette a dit…

Issue d'une famille fracassée par l'Histoire et par ses histoires, je suis tout à fait d'accord avec vous: la parole permet de débloquer certaines situations engluées dans les non-dits et le ressentiment.
Quant à la psy, elle m'a appris à vivre avec mes failles, avec tous les fantômes qui venaient me hurler des choses atroces et qui se contentent de murmurer depuis quelques années; et je suis d'accord avec vous, Lady, sur le fait qu'il faille en parler sans aux enfants lorsqu'ils sont en âge d'entendre cette histoire familiale (sans les charger, évidement), car finalement, c'est également leur histoire familiale... Votre témoignage n'est pas, à mon goût, exhibitionniste: vous dites les choses simplement, sans jamais être ni dans l'ostentatoire, ni dans le sentimentalisme. Pensées.

zenondelle a dit…

Un texte fort, pas du tout exhibitionniste, poignant et intime.
Merci.