Dans les familles, il y a toujours de secrets, des choses, tues, plus ou moins enfouies.
Au déjeuner avec nos petits enfants, en riant, l'un d'entre eux nous dit
Mais, Camille, quelles bêtises faisait il?
Nous ne parlions pas du tout de Camille à ce moment là, aussi nous avons été surpris, mais avons répondu.
Dire toutes les "bêtises" de Camille prendrait un livre entier, il faudrait raconter ce petit garçon si mignon, si précoce, si vif, si tout... Je crus qu'il était autiste à la lecture de "La vie Ripolin" de Jean Vautrin, je m'étais trompée, il n'était pas autiste mais trop précoce, caractériel me lâcha froidement un psychiatre trois ans plus tard, un HPI, de très haut niveau, confirma une psy des hopitaux de Paris encore plus tard. Elle me proposait que nous nous séparions de notre drôle de petit canard pour qu'il aille dans une structure appropriée, le lycée Masséna, à Nice, nous habitions Paris, j'ai refusé, je sentais que sans nous il serait fragilisé.
Je ne sais pas si la vie de Camille ressemblera à un roman, mais aujourd'hui encore partout où il passe il laisse des souvenirs. J'ai ainsi appris la semaine dernière que les scouts de ****** sont persuadés que durant un camp, Camille a planté la vieille 4L du propriétaire et a tué et mangé toutes ses poules, l'histoire ne dit pas s'il les avait plumé et cuit avant; on ne prête qu'aux riches. Camille est resté une étoile de chef génial, même si un peu canaille, au firmament scout.
Camille adulte est devenu un jeune homme charmant, un" pas si con", mais pas trop hors normes que ça non plus, mis à part son énorme culture musicale, et deux ou trois trucs hors du commun, Camille ressemble à un "Monsieur tout le monde". Enfin presque. Mission réussie pour nous qui craignions qu'il ne devienne ou un mac de première envergure ou un routard voire un clochard.
Mes beaux parents avaient peur pour Camille, ils voulaient que je le "visse" encore plus, le contraigne à mille choses, mais c'était trop dur pour mon petit garçon qui hurlait toutes les nuits, se grattait jusqu'à se faire des mutilations, se perchait parfois dans des arbres ou sur un pilier, Camille était hors normes, personne n'y pouvait rien.
Peu de temps avant sa mort, alors que je cherchais encore à qui Camille pouvait ressembler, mon beau père me dit un jour
J'avais peur que Camille ne ressemble à Oncle Charles..
Je n'avais jamais entendu parler d'Oncle Charles. je me suis renseignée ensuite.
Oncle Charles était un frère de la mère de mon beau père, famille aristo ayant quatre enfants, deux filles et deux garçons, les deux filles se marièrent, l'aînée Marie brillamment mais n'eut jamais d'enfant, veuve très jeune et riche, elle s'accomoda de son veuvage et ne commit pas l'erreur de se remarier. Marie passa alors le reste de sa vie à voyager, elle adorait la Chine, le scandale était grand, c'était il a plus de 120 ans.
Un des frères fut prêtre, l'autre le dernier, Charles ne voulut jamais rien faire de "bien" de sa vie, surtout pas se marier et se ranger. Il jouait et se bagarrait, criblé de dettes, il fuit la France et se mit sous la protection de la cour en Russie, c'était avant la révolution, il vécut des largesses d'une grande duchesse, on le dit gigolo, il était je crois surtout très beau et rigolo.
Marguerite fut la seule à avoir des enfants, mariée à un bourgeois, déchéance, mais riche, espérance, elle eut six enfants dont le petit dernier fut le père de mon mari, qui, n'avait jamais entendu parler de l'horrible Oncle Charles, sinon, en chuchotis craintifs.
Camille a repris sans le savoir la place de ces héros dont on ne se vante guère dans les familles tout en en étant très fier. Les temps modernes sont passés, et Camille vit très bien, je n'ai pas pu savoir quelle fut la vie de Charles, dommage, c'était sûrement quelqu'un de bien.
Le flambeau est repris comme dans toutes les bonnes familles, il y a une canaille que les enfants admirent en secret, chez nous, c'est Camille.
3 commentaires:
Ici, c'est moi !
on fait ce qu'on peut...
j'espère continuer longtemps...
Hello
Félicitations pour ce blog
Quelle aisance dans l'écriture
Bref
J'en rate pu une !!!
Et puis les vilains petits canards ?
Pas facile
Mais Dieu protège les fêlés car la lumière les transperce
Merci Michelle, je ne pense pas sincèremnt mériter le moins du monde ces compliments, mais ne suis pas à même d'en juger, et les apprécie en toute amitié.
J'adore les vilains petits canards, "hors normes", fêlés que la lumière transperce car Dieu les a placé là et ils sont bien, beaucoup les envie, peu se rendent compte à quel point ils n'ont pas choisi cette place, même s'ils l'assument très bien, ce n'est pas toujours très confortable
Enregistrer un commentaire